Cette année académique, le CeREF Santé a encadré deux étudiantes pour leur mémoire consacré à l’analyse de risque ergonomique chez les musicien·ne·s professionnel·le·s qui jouent d’un instrument à cordes. Sur base de grilles d’analyses ergonomiques, elles ont observé des musicien·ne·s d’orchestre sur le terrain, et ont formulé une série d’observations et recommandations. Une belle façon d’appliquer une méthodologie reconnue à un public dont le bien-être est encore trop peu questionné.
Mareva Dantand et Lisa Henrottin, étudiantes en Master de Kinésithérapie à la HELHa, ont mené cette recherche sous la supervision de Fabien Buisseret et Mikaël Scohier, enseignants et chercheurs, mais également en collaboration avec le CeREF Santé.
Leur projet de recherche repose sur un postulat méconnu : le métier de musicien peut engendrer des problèmes de santé, comme des troubles musculosquelettiques (TMS). Leur objectif était d’analyser les risques liés à la pratique des instruments à cordes chez les musicien·ne·s professionnel·le·s afin d’éclairer les professionnel·le·s de la santé sur cette population, et aboutir à une prise en charge plus adaptée.
Lisa et Mareva sont allées à la rencontre de deux orchestres philarmoniques professionnels : l’Orchestre Royal de Chambre de Wallonie et le Brussels Philharmonic. Pendant un mois, elles ont observé 18 musicien·ne·s en répétition et en concert, et ont analysé leurs postures, gestes et mouvements.
Un questionnaire leur a également été proposé, composé de questions tirées de questionnaires standards en analyse de risque tels le questionnaire Nordique ou le Musculoskeletal Pain Intensity and Interference Questionnaire for Musicians. Ces outils, habituellement utilisés dans le cadre d’analyse de risques en entreprise, sont rarement utilisés dans un contexte artistique.
« L’avantage, c’est que n’étant pas du milieu de la musique, nous avons apporté un regard extérieur qui a permis de voir plus de choses » a expliqué Lisa.
Les observations ont montré qu’un tier des musicien·ne·s participant·e·s ressentaient des douleurs aux niveau des épaules, et près d’un quart en ressentaient dans le dos.
Parmi les facteurs psycho-sociaux, des risques d’anxiété liés à une attitude négative du chef d’orchestre sont les résultats les plus marquants de l’étude.
Les questionnaires ont par ailleurs souligné le fait que les musicien·ne·s avaient une tendance à négliger l’attention accordée à leur santé au profit de leur carrière. Certain·e·s ont tout de même manifesté un grand intérêt pour ce projet et se sont confié·e·s sur les difficultés qu’ils·elles rencontraient.
« Je pense que celles et ceux qui ressentent des douleurs étaient plus investi·e·s, peut-être pour que des choses soient mises en place pour les aider » a rapporté Lisa. Une partie du milieu est demandeuse d’adaptations et de sensibilisation à l’ergonomie.
Des adaptations possibles
Les possibilités d’adaptation restent limitées car la posture, inhérente à chaque instrument, est peu modulable. Des pistes d’adaptation et des recommandations ont toutefois été émises :
Cette recherche met en lumière le fait qu’un·e musicien·ne est un·e travailleur·euse soumis·e à de nombreuses contraintes, au même titre que d’autres professions.
Ces contraintes peuvent être atténuées à la fois par des aménagements adaptés au sein des environnements de travail musicaux, mais aussi par une sensibilisation à la consultation préventive, tant auprès des musicien·ne·s que des professionnel·le·s de la santé.
D’après Mareva et Lisa, certain·e·s ne considèrent pas le métier de musicien·ne comme un vrai métier. « Les musicien·ne·s ont parfois peur d’aller consulter par peur de ne pas être pris au sérieux. »
Posté le 17 mars 2025
HELHa Santé